En Turquie, le PKK annonce sa dissolution et la fin de la lutte armée
Le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), en conflit avec l'État turc depuis plus de 40 ans, a décidé de se dissoudre et de mettre fin à sa lutte armée, a annoncé lundi l'agence prokurde ANF, proche du groupe armé. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a salué lundi soir une "décision importante pour le maintien de la paix et la fraternité" en Turquie.

Une dissolution attendue et maintenant officialisée. Le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a annoncé lundi 12 mai sa dissolution et la fin de plus de quatre décennies d'une lutte armée contre l'État turc qui a fait plus de 40 000 morts.
Dans un communiqué cité par l'agence prokurde ANF, le PKK considère qu'il a accompli sa "mission historique" et que grâce aux armes, la question kurde est parvenue "à un point où elle peut désormais être résolue par une politique démocratique".
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Dans un premier commentaire, lundi soir, le président turc Recep Tayyip Erdogan a salué une "décision importante pour le maintien de la paix et la fraternité" en Turquie. "Nous avançons avec confiance vers notre objectif d'une Turquie sans terreur, surmontant les obstacles en brisant les préjugés et en déjouant les pièges de la discorde".
Le PKK a confirmé que lors de son 12e Congrès, la semaine passée dans les montagnes du nord de l'Irak, décision a été prise "de dissoudre la structure organisationnelle (du parti) et de mettre fin à la voie de la lutte armée", répondant ainsi à l'appel de son chef historique et fondateur, Abdullah Öcalan, lancé le 27 février.
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À Diyarbakir, la grande ville à majorité kurde du sud-est, la nouvelle a été accueillie avec satisfaction mais sans joie excessive, par une population lasse de la violence et des faux espoirs.
"Une base solide pour une paix durable et une solution démocratique"
Abdulhakim Doganer, commerçant de 49 ans, a noté "le bonheur sur les visages" : "Avec la permission de Dieu, ça continuera. Nous, le peuple kurde, n'avons jamais vraiment été partisans de la guerre".
"Nous voulons que ce processus continue. Ils ne doivent pas tromper les gens comme les fois précédentes" a repris, méfiant, Fahri Savas, ouvrier de 60 ans.
Même prudence à Erbil, "capitale" du Kurdistan autonome dans le nord de l'Irak. "Nous ne soutenons le processus de paix que s'il est sérieux et assorti de garanties internationales", prévenait Khaled Mohammed, 55 ans. "Les gouvernements régionaux ont toujours échoué à répondre aux demandes des Kurdes, voilà pourquoi (ils) continuent de vivre et se battre dans les montagnes".
Le parti de Recep Tayyip Erdogan, l'AKP, a insisté sur une "mise en pratique" de cette décision, sans en préciser les modalités.
Dans son communiqué, le PKK affirme que sa dissolution "fournit une base solide pour une paix durable et une solution démocratique" et en appelle au Parlement turc : "À ce stade, il est important que la Grande Assemblée (...) joue son rôle face à l'Histoire", indique-t-il.
"Institutionnaliser la démocratie et l'État de droit"
"Des mesures devront être prises pour institutionnaliser la démocratie et l'État de droit comme garantie de paix sociale", a écrit sur X le président du CHP, Özgür Özel. Il a insisté sur "la nécessité que toutes les réglementations juridiques nécessaires à la démocratisation soient élaborées sans délai, sous l'égide de la Grande Assemblée nationale" et appelé à "mettre fin aux violations constitutionnelles et à prendre les dispositions nécessaires à la démocratisation".
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La principale figure du CHP, le maire d'Istanbul Ekrem Imamoglu, a été arrêtée et placée en détention depuis le 19 mars.
Özgür Özel a demandé sa libération et celle des dirigeants politiques tel Selahattin Demirtas, leader du parti prokurde DEM, emprisonné depuis 2016, qui a salué lundi une "étape historique".
L'autodissolution du PKK est l'aboutissement d'un processus initié à l'automne par le principal allié du président Recep Tayyip Erdogan, le nationaliste Devlet Bahçeli, avec la médiation du parti DEM. Ce dernier a espéré "qu'une porte vers une solution politique au problème kurde est désormais grande ouverte".
Devlet Bahçeli a lui dit souhaiter que "la page sanglante écrite (par le PKK) depuis 47 ans soit refermée pour ne plus jamais être rouverte".
Le PKK avait répondu favorablement le 1er mars à l'appel d'Abudllah Öcalan, son chef toujours respecté malgré ses 26 ans de prison à l'isolement, et annoncé un cessez-le-feu immédiat avec les forces turques. Il avait ensuite fait valoir les difficultés de réunir son congrès alors que l'aviation turque continuait de bombarder ses positions.
À 76 ans, il est peu probable que "Apo" (oncle, en kurde) quitte l'île-prison d'Imrali, au large d'Istanbul. Mais il devrait a minima voir son régime carcéral assoupli, selon la plupart des observateurs.
Avec AFP