Une "Premier League à la française" ? Ce que l'on sait du projet de la FFF
Le président de la Fédération française de football (FFF), Philippe Diallo, a présenté lundi son plan pour sauver le football professionnel tricolore. En actant la fin de la LFP et en mettant les clubs au cœur de la gouvernance, il souhaite s'inspirer du modèle de l'élite du championnat d'Angleterre.

Disparition de la Ligue de football professionnel (LFP), réforme de la gouvernance, un projet "novateur et de rupture"... Philippe Diallo a présenté lundi 12 mai une réforme ambitieuse du football français pour sauver un milieu englué dans une sempiternelle crise des droits TV et un mode de gouvernance à bout de souffle.
Le modèle de la réforme Diallo vient d'Angleterre : "C’est une Premier League, car c’est bien une société de clubs qui organise un championnat. Mais elle est 'à la française', car je souhaite que les spécificités sportives et culturelles de la France soient conservées. Ce n’est pas simplement le copier-coller de la Premier League anglaise."
"On va passer d'une ligue qui était une association loi de 1901 à une société commerciale dont les clubs seront les actionnaires", détaille le président des "3F", restituant les travaux issus des états généraux du football professionnel qu'il avait initiés en mars.
Le rôle de cette dernière, qui consistait "à valoriser les produits", devrait s'étendre "à l'organisation matérielle du championnat", a-t-il encore explicité. "On avait la Fédération, la LFP et la société commerciale ; dans notre projet, il n'y a plus qu'une fédération et une société de clubs, on rationalise. La LFP était presque devenue une coquille vide."
Une reprise en main par la FFF
"C'est un projet de rupture", explique Philippe Diallo, "parce que je souhaite que la Fédération y occupe une place significative".
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Dans cette reprise en main de la Fédération sur la LFP, qui opère dans le cadre d'une délégation de pouvoir, un certain nombre de compétences actuellement exercées par la Ligue remonteraient à la FFF, comme la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG), le gendarme financier du football professionnel, ou la commission de discipline.
Le projet de Philippe Diallo, s'il est mis en œuvre, prévoit aussi de donner à la Fédération un droit de veto sur les questions d'intérêt général, comme le changement de format des compétitions ou le nombre de montées et de descentes entre divisions.
Si la FFF serait la principale gagnante de cette reforme, la LFP, qui gère actuellement les intérêts du football professionnel français, en serait la première victime. Logique quand son président, Vincent Labrune, a concentré les critiques lors des dernières semaines.
"Il n’y aura plus de président élu. La direction sera assurée par un directoire à la tête duquel il y aura un CEO (patron exécutif) recruté par les clubs, salarié et révocable de manière immédiate." Pour résumer, le dirigeant souhaite évoluer "d’un système électif à un système de nominations" pour la direction de la future ligue.
Vers une chaîne gérée par les clubs
Image dégradée, baisse drastique des droits TV, incertitude pour la diffusion de la Ligue 1 la saison prochaine, piratage, déficit des clubs estimé entre 1,2 et 1,3 milliard d'euros par la DNCG : il y a pourtant urgence à agir pour le secteur professionnel.
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Philippe Diallo a vu avec bonheur l'arrivée de Nicolas de Tavernost, l'ancien patron de M6, à la tête de LFP Media le mois dernier.
Celui-ci doit, d'ici la fin mai, "revenir avec un certain nombre de préconisations, la relation avec DAZN (diffuseur principal de la Ligue 1, NDLR) s'arrêtant, sur la façon dont les championnats vont être diffusés à partir d'août 2025. C'est un point d'attention de court terme évidemment essentiel", a-t-il dit.
Philippe Diallo veut en outre permettre aux clubs de retrouver une "trajectoire d'équilibre" au moment où ils doivent présenter début juin devant la DNCG leurs budgets prévisionnels de la saison prochaine.
"Par exemple, grâce à des dispositifs de limitation des effectifs, un plafonnement de la masse salariale, un regard plus attentif sur les questions de multipropriétés", énumère-t-il.
Enfin, le président de la FFF va inviter les clubs à ouvrir une négociation sur une répartition différente des droits audiovisuels, afin que "ceux qui n'ont rien aient quelque chose".
Adoption au Sénat en juin ?
Le chemin est toutefois encore long avant que la révolution souhaitée par le président de la "3F" se concrétise. Philippe Diallo doit aller sur "le terrain législatif" pour mettre en place une telle réforme et veut se servir de l'examen, le 10 juin au Sénat, d'une proposition de loi de Michel Savin (Les Républicains) et Laurent Lafon (UDI) sur la gouvernance du sport professionnel.
La proposition de loi, vivement critiquée par les différentes ligues professionnelles, offre la possibilité aux fédérations de retirer à ces dernières la "subdélégation de service public" qu'elles exercent en cas de "manquement à l'intérêt général de la discipline".
Suivant le calendrier législatif et les allers-retours entre les deux chambres, combinés à l'incertitude parlementaire actuelle, la création de cette "Premier League à la française" pourrait ne voir le jour que dans plusieurs mois, voire quelques années, "au mieux pour la saison 2026-2027", selon Diallo.
La ministre des Sports, Marie Barsacq, a pour sa part évoqué "une trajectoire à moyen-long terme".